Alexandre : Monsieur le Président, je vous propose de rentrer dans le vif du sujet en évoquant les critiques dont vous faites l’objet de la part de certains chauffeurs de taxi qui vous reprochent de batailler plus pour la G7 que pour les taxis.
Ahmed : La première chose aujourd’hui c’est que la G7 combat à sa manière et moi, Président de Fédération Nationale des Taxis Indépendants, je combats à ma manière. Il y a beaucoup d’idées reçues, elles sont faciles et les critiques aussi sont faciles. Mais aujourd’hui j’ai une grande responsabilité, puisque je représente les taxis qui sont locataires, actionnaires, artisans, donc je représente des patrons, comme la G7 représente des patrons et on a tendance à faire la confusion entre les deux. La G7 défend son entreprise, chacun défend son business. Ma priorité c’est de défendre les artisans taxis.
Alexandre : J’ai entendu certains dire que la G7 ne devait pas siéger lors des réunions avec Grandguillaume.
Ahmed : C’est à la G7 qu’il revient de répondre, ce n’est pas à moi. Mais il ne faut pas oublier que la G7 est un acteur important dans la profession du taxi. Et quand elle parle, elle ne parle pas seulement par rapport à son entreprise, central radio, taximètres etc., elle parle aussi par rapport aux 8000 chauffeurs affiliés, et si ces chauffeurs sont en difficulté, alors la G7 est en difficulté. Faut pas oublier que c’est un travail d’équipe.
Alexandre : Oui mais vous êtes avare de critiques envers la G7.
Ahmed : Je peux descendre la G7, et la critiquer, mais pour cela il faut que les actions de la G7 le justifient. Le jour où la G7 me donnera des raisons de l’attaquer je serais le premier à le faire. Mais comme la G7 va dans l’intérêt de la profession, elle fait évoluer la profession, je ne peux pas aller contre la G7.
Aujourd’hui on me critique, c’est facile de me critiquer, et ceux qui me critiquent c’est souvent ceux qui n’ont pas eu la radio, croyant que c’est moi le responsable, ceux qui ont été résiliés pour fraude, ou pour faux appels pour gagner des places d’attentes afin de passer devant leurs collègues et ceux qui ont surfacturés les clients en rajoutant sur les relevés. Deux de mes propres adhérents ont été résiliés et pour lesquels je n’ai rien pu faire parce que mon honneur et ma morale m’empêchent d’agir. Celui qui ne respecte pas les règles est sanctionné et c’est normal.
Ce n’est pas parce que je siège à la commission du Club Affaires et que je suis porte parole de cette commission que je dois laisser passer ceux qui ne sont pas prêts à entrer au Club Affaire. La même chose ce produit lorsque un chauffeur a commis un acte répréhensible, je ne peux cautionner ses actes devant la commission paritaire parce qu’il fait du mal à toute la profession, avec le risque que les clients mécontents aillent vers les VTC.
Effectivement ces chauffeurs indélicats vont me critiquer. Mais moi j’ai ma conscience pour moi.
Alexandre : Quels sont vos relations avec la direction de la G7 ?
Ahmed : Des relations cordiales. Lors d’un procès dans lequel la FNTI était partie civile, les journaliste m’ont interrogé sur le monopole qu’avait Nicolas Rousselet dans le taxi, j’ai répondu que ni Nicolas Rousselet ni les taxis n’ont le monopole, car quand tu arrives à l’aéroport t’as toutes sortes de transport qui se présentent à toi, les bus RATP, les navettes, les motos, les VTC, les LOTI, les cars Airfrance, il faut donc arrêter avec cette histoire de monopole.
Mais Nicolas Rousselet dérange sur le plan politique. Pour quelle raison je l’ignore, il est assez grand pour se défendre tout seul, il a des avocats pour ça.
En ce qui me concerne le syndicat m’a bouffé ma vie, j’ai du revendre ma licence pour m’en sortir pour ensuite racheter une autre. Beaucoup de gens pensent que je suis payé, alors que je ne suis payé par personne. C’est donc un sacrifice que je fais pour défendre le droit de mes collègues. Au sein de notre syndicat nous ne recevons pas d’aide ni de subventions, mon poste est bénévole et honorifique. Je défie quiconque de faire ce que je fais, de laisser son travail et sa famille pour assister à des réunions dans les ministères et ne pas travailler pour gagner sa vie. Lors de la dernière manifestation beaucoup de gens sont venus me remercier pour ce que je faisais gratuitement et bénévolement et j’ai pu récupérer beaucoup d’adhérents.
Alexandre : Justement parlons des adhérents, car il me semble que certains pseudo syndicats ne représentent qu’eux mêmes, vous à la FNTI combien d’adhérents avez vous.
Ahmed : La FNTI au niveau national regroupe plus de 3000 adhésions, alors que la FTI 75 (Paris) regroupe 700 adhérents, et je peux le prouver contrairement à d’autres syndicats qui mentent sur le nombre de leurs adhérents.
Alexandre : Quels syndicats ?
Ahmed : je ne veux pas citer des noms ils se reconnaitront. Mais en ce qui me concerne je suis fier d’avoir pu augmenter le nombre d’adhérents au sein de notre syndicat depuis mon arrivé.
Alexandre : Je vous connais monsieur le président depuis vos débuts dans le taxi et déjà à l’époque vous étiez un combattant.
Ahmed : C’est vrai et les gens me le disent, « mais Ahmed tu étais un combattant avant même d’être syndiqué, tu défendais déjà à l’époque les taxis ». C’est ça qui fait ma fierté aujourd’hui.
Alexandre : Est-ce que vous pensez que c’est la fin du taxi, où comme le disent certains que les VTC vont prendre la place des taxis ?
Ahmed : Non, ce n’est pas la fin du taxi, peut-on imaginer Paris sans la tour Eiffel, alors on ne peut imaginer la plus belle ville du monde sans les taxis. Et je dis à tous ceux qui peuvent investir d’acheter des licences de taxi, d’autant plus que le prix de la licence a fortement baissé.
Alexandre : Oui elle se négocie en ce moment autour de 145 000€.
Ahmed : Je déplore la peur de nos collègues qui ont fait chuter le prix de la licence en voulant vendre à tout prix. C’est ce qui s’était déjà produit avec le rapport Attali. Je comprends leur peur mais je le déplore. Je sais que c’est difficile en ce moment, il y a la conjoncture économique et les conséquences des attentats mais tout ça n’est que provisoire. Moi je crois au taxi et celui qui a un peu d’argent je lui conseille d’acheter il me dira merci plus tard. Je veux préciser que tant que je serai là et tant qu’il y aura les autres syndicats qui seront déterminés comme je le suis et qui sacrifient leurs temps et leur vie de famille avec lesquels je suis fier de défendre le taxi, le taxi se relèvera.
Alexandre : Et le député Grandguillaume, avez-vous le sentiment qu’il comprend les enjeux ?
Ahmed : Nous l’avons rencontré trois fois et c’est quelqu’un qui est à l’écoute de la profession et il est très sensible parce qu’un membre de sa famille a exercé en tant que chauffeur de taxi, nous devons le voir le 26 février pour prendre connaissance de ses propositions. Certains de mes confrères voulaient des réponses immédiates, mais il faut comprendre qu’il faut du temps pour le médiateur avant de faire des propositions. Lors d’une réunion qui a duré cinq heures nous avons énormément échangé sur la future formation des taxis et VTC pour que la formation de ces derniers soit sérieuse et que le contrôle des examens soit effectué par des personnes qualifiées , mais des discussions doivent encore avoir lieu d’ici juin sur ce qu’on appelle le tronc commun.
Alexandre : Grandguillaume et à travers lui le gouvernement ont-ils pris conscience de la fraude orchestrée par les plateformes ?
Ahmed : Grandguillaume et le gouvernement se sont rendus compte que la colère des taxis était justifiée, que nos revendications de faire respecter la loi étaient fondées aux travers de toutes les anomalies qu’ils ont constatés suite aux contrôles effectués.
Alexandre : En attendant les propositions du médiateur vendredi prochain je souhaite vous laisser conclure cet entretien.
Ahmed : Je veux que mes collègues qui vont lire Taxi News, ne cèdent pas à la peur sur l’avenir du taxi, il faut vaincre la peur, il faut croire à notre profession. L’arrivée des VTC nous a fait du mal mais nous a aussi permis de nous remettre en question pour offrir un meilleur service aux clients. Et là encore je rends hommage à la G7, qui a mis en place la flotte service plus, je vais encore avoir droit aux critiques, mais je dois dire la vérité, Elle a obligé les chauffeurs à porter un costume et une cravate, mis à la disposition des bouteilles d’eau, ce qui plait aux clients qui le disent. Je suis pro G7 quand son action favorise l’essor de la profession.
Alexandre : Je me souviens que par le passé vous vous étiez opposé à la G7.
Ahmed : Merci de le rappeler Alexandre, j’avais effectivement avec des collègues manifesté, devant le siège de la G7, et ce qui prouve que je ne roule pas pour la G7, je roule pour moi et je roule pour défendre les intérêts des chauffeurs de taxi. D’ailleurs si je roulais pour la G7 je ne serais pas en train de me taper le pavé parisien, je serai assis dans un bureau luxueux avec une secrétaire à ma disposition. Je n’oublie pas que je suis avant tout un taxi ce qui me permet de gagner ma vie et en parallèle je suis président d’une fédération nationale bénévolement. Notre syndicat ne fonctionne que par les cotisations de nos adhérents, nous ne percevons aucune subvention d’aucune institution.
Alexandre : Quel est le montant de la cotisation que payent les adhérents ?
Ahmed : A Paris c’est 130€ par an, en province en fonction des département c’est entre 180 et 240€ par an.
Alexandre : Merci monsieur Senbel pour vos propos et à bientôt pour la suite.
Entretien avec Ahmed Senbel Président de la FNTI (Fédération Nationale des Taxis Indépendants) (139, rue Baraban – 69003 LYON
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