Et vous, vous êtes pour ou contre la limitation de vitesse à 80km/h ?
Le gouvernement vient d’annoncer au mois de janvier toute une série de mesures ayant pour objectif de diminuer le nombre de victimes sur les routes. Parmi elles, il y a la très controversée réduction de la vitesse maximale autorisée de 90 à 80 km/h sur plus de 400 000 km du réseau routier secondaire dont les voies à double sens ne sont pas séparées par une barrière de sécurité. Elles concentreraient selon l’Observatoire National Interministériel de la Sécurité Routière : 87% de la mortalité sur les routes (hors agglomération) ou bien encore 55% de l’ensemble de la mortalité routière en 2016. Cette nouvelle limitation de la vitesse sera effective à compter du 1er juillet 2018.
Avant que la décision ne soit prise, ce projet était déjà vivement critiqué par les associations de défense des conducteurs parmi lesquelles, l’association 40 millions d’automobilistes qui a recueilli plus de 500 000 signatures sur une pétition contre cette limitation de la vitesse. Elle a d’ailleurs argumenté contre ce projet en lui opposant une expérimentation réalisée au Danemark entre 2011 et 2014 lorsque le gouvernement de ce pays a décidé de passer la vitesse maximale autorisée de 80 à 90 km/h sur une partie de son réseau secondaire. Au terme de cette expérimentation, l’augmentation de la vitesse moyenne sur les routes ne fût que 0,2% avec une légère baisse des accidents. Sauf sur les sections de routes abîmées et à proximité des croisements où le nombre d’accidents restaient stables.
L’association met aussi en avant les exemples britanniques et allemands qui avec une vitesse limite de respectivement 97 km/h pour les uns et 100 km/h pour les autres ont moins d’accidents que ce que nous connaissons sur les routes françaises. Ce à quoi la Direction de la Sécurité Routière rétorque que dans les faits, les britanniques roulent à 77 km/h de moyenne parce qu’une partie de leur réseau routier ne permet pas de rouler plus vite et que l’état des routes allemandes impose de limiter la vitesse à 70, voir 80 km/h sur une partie du réseau.
Bon à ce rythme-là, au jeu des « arguments » face aux « contre-arguments », il est bien difficile de dire qui a tort et qui a raison.
Voyons maintenant sur le plan mathématique et expérimental si l’abaissement de la Vitesse Maximale Autorisée (VMA) peut influer sur le nombre de victimes sur les routes. Attention, accroché vous bien :
La Sécurité Routière indique dans un document remis aux Préfets, qu’une étude réalisée par un comité d’experts du Comité National de la Sécurité Routière (CNSR) a permis d’évaluer un gain de vies entre 200 et 400 par an grâce à une réduction de la vitesse à 80 km/h. Pour en arriver à cette conclusion, cette étude se base sur les travaux des chercheurs Göran Nilsson et Rune Elvik qui ont démontré qu’une variation de la vitesse de 1% induit une variation du nombre d’accidents corporels de 2% et une variation du nombre d’accidents mortels de 4%. Toutefois, ces chercheurs ont leurs détracteurs qui dénoncent le fait qu’ils écartent certaines données comme les progrès techniques, l’état des routes, la vitesse au moment de l’impact, le modèle de voiture…
Pourtant, une expérimentation de l’abaissement de la VMA à 80 km/h qui a été conduite entre juillet 2015 et juillet 2017 sur trois portions de routes bidirectionnelles dans quatre départements français, vient appuyer la crédibilité de l’abaissement de la vitesse sur les routes secondaires. En effet, selon le Centre d’Etudes et d’Expertises sur les Risques, l’Environnement, la Mobilité et l’Aménagement (CEREMA), on peut observer une diminution de la vitesse moyenne, une stabilité du niveau d’engorgement de la circulation et un nombre d’accidents à la baisse (le centre d’études précise tout de même que le délai scientifique pour ce type d’études devrait être de cinq ans au lieu de deux ans dans le cas présent).
Et si, comme certains le pensent, la vitesse ne serait qu’une circonstance aggravante de l’accident avant d’en être la cause d’origine. Car derrière le mot « vitesse », il y a deux traductions possibles : soit, la vitesse est excessive puisque supérieure à la limite de vitesse autorisée. Soit, la vitesse est inadaptée en ce sens que la vitesse peut être inférieure à la vitesse limite autorisée mais trop élevée eu égard aux conditions de circulation : densité du trafic, conditions de visibilité et à l’état de la route. Alors que les accidents sont dus pour une moitié à la vitesse excessive et pour l’autre à une vitesse inadaptée et qu’un tiers de l’accidentalité routière a pour origine le facteur « vitesse » au sens large, la décision d’abaisser la vitesse sur les routes ne viserait plus que 15% des accidents mortels.
D’ailleurs comme le précise l’association de prévention routière, les accidents et la gravité de leurs conséquences s’expliquent par une combinaison de facteurs liés au conducteur, au véhicule, à la route, aux conditions de circulation et aux secours entre autres.